Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/170

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Oui, sans doute, dit Prenany, cela est bien plus long & bien plus joli que tout ce que l’on peut dire au monde. Avec ce langage-là, on est trois heures à lire une aventure qui n’en aura duré que deux ; on a plus de plaisir par conséquent que si on l’avoir vue soi-même.

Je veux bien vous céder, dit l’inconnu ; puisque vous le voulez, je conviens que cela est ; plus spirituel ; mais vous n’étiez pas né pour ces sortes de phrases ; vous tenez un peu du cothurne dont je suis chaussé, & ce langage mignon, figuré, étendu, est fait pour ceux qui portent l’habit que vous me voyez.

Et comment appelez-vous ceux qui sont vêtus de cette manière, répliqua le prince. Cela s’appelle des bourgeois, dit l’habitant du roc : j’en ai engendré depuis peu qui sont les délices de tout le monde ; comme ils sont simples en eux mêmes, qu’il leur arrive des aventures fort communes, & qu’ils disent des choses très-ordinaires, s’ils n’étoient pas recherchés dans leurs expressions, s’ils n’embarrassoient pas un peu l’esprit, s’ils ne l’amusoient pas par le désir de les entendre, on les laisseroit là. Mais leurs discours sont autant de petites énigmes, dont le mot est familier à tout le monde, & qu’il y a seulement plaisir à deviner.

Il faut avouer, dit Prenany, que vous êtes