Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/179

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notre île quelques Arrouaques (ce sont des peuples qui habitent sur les bords de ce lac du côté de l’orient). Mon père leur proposa de m’échanger contre quelques marchandises ; le marché fut conclu entre eux, sans que j’en susse rien & je me trouvai, dans le temps que j’y pensois le moins, avec les fers aux pieds, entre les mains de mes nouveaux maîtres.

La nature arracha quelques larmes des yeux de ma mère, quand elle me vit emmener par des gens inconnus mais mon père lui montra les marchandises qu’il avoit reçues en échange de moi ; cela la consola. Va, me dit-elle, mon cher fils, tes maîtres me paroissent des gens humains, tu n’auras pas plus de peine avec eux que tu en avois parmi nous. Je ne lui fis aucun reproche, non plus qu’à mon père sur son peu d’humanité ; je leur dis au contraire, en riant que je souhaitois que mes frères devinrent plus robustes, & de meilleure défaite encore que moi, afin qu’ils en tirassent plus de profit, & je souhaitai à mes frères qu’ils ne fussent jamais bons à rien afin de rester tranquilles & sans travail.

Nous nous embarquâmes pour gagner l’Amérique & pendant le voyage j’appliquai tous mes soins à me faire aimer de mon nouveau maître. Mon caractère lui plut, & il m’assura