Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/424

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le marquis, elle lui dit qu’elle étoit si sensiblement touchée de l’honneur qu’il lui vouloit faire, que si elle pouvoit se résoudre à un second mariage, elle le préféreroit à tout autre ; mais qu’après avoir examiné ce qu’elle devoit, & à la mémoire de son mari, & à elle-même, il lui paroissoit que rien n’étoit plus louable à une veuve que de ne songer qu’à élever ses enfans, & qu’elle croyoit qu’il avoit pour elle assez d’estime pour vouloir bien approuver le dessein qu’elle avoit pris de ne point changer d’état. Le marquis combattit long-temps cette résolution, sans la pouvoir ébranler, & il fut contraint de la laisser retourner dans sa province. Elle alla d’abord chez son amie, qui, apprenant que le bien de ses affaires étoit l’unique motif qui lui avoit fait souffrir les soins du marquis, voulut lui parler du cavalier : mais la dame l’arrêta en lui ouvrant son cœur ; elle lui dit que ce n’étoit pas sans de grands efforts qu’elle avoit vaincu sa passion ; mais que l’outrage qu’il lui avoit fait, par ses injustes soupçons, dans un temps où elle lui sacrifioit avec plaisir une plus grande fortune que celle qu’elle auroit pu attendre de lui, l’avoit tellement blessée, qu’il lui étoit impossible de l’oublier ; que par-là, il l’avoit rendue à elle-même, & qu’elle profiteroit de cet avantage pour