Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/43

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étoit d’échanger ensuite cette petite fille contre son fils, & d’élever ce prince sous des habits contraires à son véritable sexe.

Mais il arriva un grand malheur dans cette occasion. On ne prit point garde que la petite fille que l’on porta à la reine ne voyoit que d’un œil ; ce fut la reine qui s’en aperçut la première. Ah ! face de lune ! s’écria-t-elle, ma nièce est borgne ; c’est grand dommage ; sans cela, elle auroit les plus beaux yeux du monde. La nourrice voulut faire croire à la reine qu’elle se trompoit ; mais la chose fut avérée en présence de toute la cour. Ainsi, quand on reporta cet enfant à Acariasta, & qu’elle voulut mettre son fils à sa place, il fallut absolument lui crever un œil.

La sœur de la reine eut un grand chagrin de ce défaut d’attention ; elle gronda bien fort toutes les femmes ; mais il n’y avoit pas moyen de faire autrement. On choisit un homme habile, qui creva un œil au petit prince le plus adroitement du monde, & on donna à l’enfant le nom de Solocule, qui convenoit à un garçon aussi bien qu’à une fille.

Solocule, qui passoit pour la nièce de la reine, fut élevé dans le palais auprès de la princesse Fêlée, & leurs appartemens n’étoient pas éloignés. Il avoit une figure assez agréable ;