Page:Anthologie de la Société des poètes français, 1907.djvu/191

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
100
PRŒLUDIA


Oh ! ces mots qu’on devine et dont pas une lyre
Ne fera concevoir la musique et l’accent,
Ces mots que le câlin avait voulu me dire,
Pourrai-je donc, poète indécis qui soupire,
Amis, les répéter sur mon rythme impuissant ?

Pourrai-je vous donner la joie informulée,
La caresse de fleurs que j’ai cru ressentir,
Qui crissait comme un pas de femme sous l’allée
Et qui chantait, ainsi que la note perlée
D’une harpe lointaine achevant un soupir ?

Non, je ne pourrai pas vous faire cette offrande
De tout ce qu’il m’a dit, mon rêve caresseur ;
C’était, m’en souvient-il, une belle légende
Déroulant son récit comme la traîne grande
D’une Fée inconnue, — et qui serait sa sœur !

Mais tout était trop frêle ; et même, ô Poésie,
Ton langage léger n’est pas assez léger
Pour ne pas en briser la trame plus choisie
Qu’un rayon de soleil sur un bol d’ambroisie
Ou qu’un effluve épais autour d’un oranger !

Or, l’apologue, lui, de ce radieux conte
Ma Muse va tenter de vous le dire encor,
Et si je le déflore après elle, à ma honte,
Vous imaginerez ce qu’il fut, — et j’y compte,
— Puisque je n’ai la voix qu’avait mon rêve d’or !