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LES ONZE MILLE VERGES


nous te connaissons, tu peux venir chez moi. Chez Alexine, ce n’est pas possible. Elle ne peut même pas me recevoir, moi. C’est pour çà qu’elle a un foutoir. Son sénateur est trop jaloux. Moi je m’en fous ; mon amant est explorateur, il est en train d’enfiler des perles avec les négresses de la côte d’Ivoire. Tu peux venir chez moi, 214, rue de Prony. Nous t’attendons à quatre heures.
Culculine d’Ancone.

Sitôt qu’il eut lu cette lettre, le prince regarda l’heure. Il était onze heures du matin. Il sonna pour faire monter le masseur qui le massa et l’encula proprement. Cette séance le vivifia. Il prit un bain et il se sentait frais et dispos en sonnant pour le coiffeur qui le coiffa et l’encula artistiquement. Le pédicure-manicure monta ensuite. Il lui fit les ongles et l’encula vigoureusement. Alors le prince se sentit tout à fait à l’aise. Il descendit sur les boulevards, déjeuna copieusement, puis prit un fiacre qui le mena rue de Prony. C’était un petit hôtel, tout entier habité par Culculine. Une vieille bonne l’introduisit. Cette habitation était meublée avec un goût exquis.