Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/177

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dans les transports de la rage ? Il est plutôt à présumer que sa fureur est calmée, et que son accès est passé. Comme chacun disoit sur cela son avis, ils convinrent tous, qu’il falloit éprouver ce qui en étoit, et regardant par une fente au travers de la porte, ils me voient sur mes jambes, tranquille comme un animal qui se porte bien, et qui est doux et paisible ; ils ouvrent la porte, et examinent avec plus d’attention, si j’étois appaisé.

Un d’entre eux, comme s’ils eût été envoyé du ciel pour me sauver la vie, apprit aux autres un moyen pour connoître si j’étois malade, qui étoit de mettre un vaisseau plein d’eau fraîche devant moi, disant que, si j’en approchois sans répugnance, et comme j’avois accoutumé de faire, c’étoit une marque que je n’avois aucun mal, et que je me portois fort bien ; au contraire, que, si je la fuyois, et que j’eusse de l’horreur de la voir et d’y toucher, c’étoit une preuve certaine que la rage continuoit de m’agiter, ajoutant que c’étoit l’expérience qu’on avoit coutume de faire en ces sortes d’occasions, et qu’on la trouvoit écrite même dans les anciens livres.

Ils approuvent tous ce conseil, et dans le moment ils apportent un grand vaisseau plein d’une eau très-claire, prise d’une fontaine qui étoit près de la maison, et me le présentent en se tenant encore sur leurs gardes. Je vais d’abord au-devant d’eux, d’autant plus que j’avois une fort grande soif ;