Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/257

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le soldat lui parlant grec : où mènes-tu cet âne (25), lui dit-il ? Je vais, lui répondit mon maître, à la ville qui est ici proche. J’en ai besoin, lui dit le soldat, pour lui faire apporter, avec d’autres bêtes de charge, le bagage de notre capitaine qui est dans un château du voisinage. Il me prit en même-temps pour m’emmener. Le jardinier essuyant le sang qui couloit de la plaie que le soldat lui avoit fait à la tête, lui dit, en le conjurant par tout ce qu’il pouvoit espérer de plus heureux : Camarade, usez-en avec plus d’humanité et de douceur avec moi. De plus, cet âne paresseux, et qui, outre cela, tombe du haut-mal (26), a bien de la peine à porter de mon jardin qui est ici près, quelques bottes d’herbes au marché, après quoi, il est si las et si essoufflé qu’il n’en peut plus ; ainsi il s’en faut bien qu’il ne soit capable de porter des fardeaux un peu pesans.

Enfin, voyant qu’il ne pouvoit fléchir le soldat par ses prières ; qu’au contraire, il ne faisoit que l’irriter encore davantage, et qu’il se mettoit en devoir de lui casser la tête avec le gros bout du sarment qu’il tenoit en sa main, il eut recours à un dernier expédient. Il se jetta à ses pieds, feignant de vouloir embrasser ses genoux pour exciter sa compassion ; et le prenant par les deux jambes, il fait un effort, et le renverse rudement par terre ; en même-temps, il saute sur lui, et se met à le mordre, et à lui frapper le visage, les mains et le corps à