Page:Arène - Contes de Paris et de Provence, 1913.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
CONTES DE PARIS ET DE PROVENCE

descendre, car ses anciennes blessures, et d’autres encore reçues depuis, lui rendaient le corps un peu raide.

Après des jours, après des nuits, voyageant par terre et par mer, Jean Bénistan, toujours avec son serviteur, arriva en vue de Marseille. Mais il n’y entra point, non plus que dans aucune autre ville, tant il était pressé de retrouver les siens.

Et pourtant, lorsque, du haut de la dernière colline, il découvrit sa maisonnette, le cœur lui manqua et il n’osa pas aller plus avant, car il eut peur soudain que quelqu’un n’y fût mort.

— Remarque, dit-il au moricaud, cette cabane couverte en joncs d’étang, avec une porte qui a l’air neuve ? Tu vas te cacher tout près, dans la haie, et tu reviendras me dire ce qui se passera.

Au bout d’une heure le moricaud revint :

— J’ai vu sortir de la cabane une femme en deuil et six enfants qui s’en sont allés vers l’église.

— Et qu’as-tu vu encore ?

— J’ai encore vu un vieux chat roulé au soleil sur le seuil.

Alors Jean Bénistan pleura, de la joie qu’il éprouvait en apprenant que sa femme et ses enfants vivaient et que le chat était revenu.

Jean Bénistan sortit quatre clous d’or de sa poche.

— Prends une pierre pour marteau, et, pendant que les habitants n’y sont pas, va planter ces clous d’or dans la porte de la cabane.

Quand Tardive revint de l’église, quand elle aperçut le chat qui, hérissé, soufflait de colère sur le toit, et les quatre clous d’or aux quatre coins de