Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/582

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Lorsque Cuvier hasarda ses premiers pas dans la route immense et non frayée que depuis il a parcourue avec.tant d’éclat, deux hommes supérieurs, Saussure et Werner, venaient d’étudier, l’un sur les croupes neigeuses des Alpes, l’autre dans les profondeurs des mines de Saxe, la partie purement minérale du grand problème de la théorie de la Terre, et d’en marquer les traits les plus saillants. La question envisagée sous ce point de vue n’était plus alors assez large pour le génie de Cuvier.

À la même époque, d’autres observateurs recueillaient, par milliers, des débris fossiles des corps organisés. Ces objets, considérés comme de simples curiosités, allaient, à ce seul titre, s’enfouir dans les collections publiques et dans celles des amateurs. L’œil pénétrant de Cuvier aperçut de prime abord tout ce que leur étude dévoilerait de vérités nouvelles et la direction de ses recherches se trouva fixée.

Les restes des animaux fossiles, les os des quadrupèdes surtout se rencontrent rarement réunis. On les trouve jetés pêle-mêle, fracturés de mille manières, et le naturaliste est réduit à déterminer l’ordre, le genre, l’espèce et la taille des individus dont il a les débris sous les yeux, d’après l’inspection des plus petits fragments. De là, la nécessité d’une science dont, avant Cuvier, il existait à peine de légers rudiments ; de là, cette admirable anatomie comparée qui, établissant dans tous les êtres organisés une corrélation spéciale et intime centre les parties les plus éloignées et en apparence les plus distinctes, permet de décider, d’après la forme d’un os quelconque, d’un os du pied, par exemple, si l’animal