Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/89

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travail, le plus considérable qui ait jamais été exécuté à la mer, a toujours été dirigé par d’anciens élèves de l’École. Dans l’exécution de ce môle gigantesque, on fait usage de procédés dont nous pourrons ici revendiquer l’invention pour nos élèves théoriciens, s’il est vrai que la découverte d’une vérité perdue puisse être assimilée à la découverte d’une vérité nouvelle. Pour que le môle résistât aux coups furieux de la mer soulevée par les vents du nord, il fallait le former de roches du plus grand volume. Mais de pareilles roches n’existent qu’à une grande distance d’Alger. Leur transport eût été très-dispendieux, et les finances de l’État n’y auraient pas suffi. C’est alors que l’ingénieur des ponts et chaussées à qui cette œuvre était confiée, M. Poirel, profitant des propriétés précieuses que M. Vicat avait reconnues aux pouzzolanes, imagina de substituer des blocs artificiels aux blocs naturels auxquels on avait été forcé de renoncer. C’est à l’aide des blocs artificiels que le môle s’est tous les ans majestueusement avancé dans la mer.

« Désormais, le colossal vaisseau de ligne, les navires à vapeur de toute grandeur, le bâtiment de commerce chargé des richesses de l’Europe et de l’Afrique, le frêle esquif, à l’abri de la montagne artificielle si merveilleusement sortie du sein des flots, et dont les éléments, chose admirable ont été fabriqués sur place, défieront la mer furieuse qui jadis les eût brisés en éclats ; leurs équipages témoigneront, par des acclamations enthousiastes et reconnaissantes, des services rendus à la mère patrie, au commerce et à l’humanité, par ces magnifiques travaux.