Page:Arbois de Jubainville - Cours de littérature celtique, tome 1.djvu/83

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Et l’on reprend :

Aed par sa puissance a de la flamme l’éclat.[1]

Ce vers a, en vieil irlandais, un charme que le français ne peut rendre, parce que le nom propre Aed, employé comme nom commun, veut dire « feu, » en vieil irlandais.

Au nom des bardes, la dernière strophe associe un mot qui nous rappelle un des plus anciens usages de la race celtique. C’est le mot que j’ai traduit par cervoise, en irlandais coirm ou cuirm[2]. Il se trouve déjà vers l’an 100 avant notre ère chez Posidonius, le premier en date des auteurs de l’antiquité classique qui nous parle des bardes. « Chez les Celtes, » dit-il, « les gens riches boivent du vin qui leur arrive d’Italie par Marseille ; ils le prennent soit pur, soit mélangé avec de l’eau. Les gens de fortune moyenne le remplacent par une bière préparée au miel, et le plus grand nombre se contente d’une bière sans miel qu’on appelle corma. » Suivant lui c’est avec du froment qu’on la fabrique. Dioscoride, postérieur d’un siècle et demi, est plus exact en disant qu’on la fait avec de l’orge, et il écrit le nom de cette liqueur avec une

  1. Windisch, Irische Texte, p. 319-320.
  2. Grammatica celtica, 2e éd., p. 268, 269.