Page:Archives israelites 13.djvu/406

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$00 ·nc¤rvss _ parfois haineuses, et toujours exagérées, où nos défauts étaient mis en rclief, et nos qualités même outrées jusqu‘à paraître des défauts. Dans le langage lui-même, des mots sont entrés qui correspondaient à cet ordre d‘idées ou plutot de préjugés, et qui étaient comme l‘écho naturel de la réprobation dont nous étions l'objet; ces espèces de témoignages spontanés ont même survécu aux sentiments qui les ont inspirés, et entretiennent malheureu- sement encore ces déplorables sentiments : calculer judaiquement et agir comme un juif sont des expressions plus difficiles à chas- ser de la langue que les dispositions les plus iniques et les plus intolérantesà bannir du domaine des lois; et c`est au théâtre que nous sommes en grande partie redevables de l'autorité dont elles sont revétues. Souvent, d’un autre côté, nous nous sommes étonnés que l’i- magination créatrice d’un homme de talent, israélite ou non israélite, n’ait pas pris pour cadre énergique et animé d'un drame ou d'un roman la longue épopée de nos malheurs et de nos persécutions : on aurait pu personnifler dans une noble et puissante figure ces courageux confesseurs d`une foi injuriée, bafouée, traquée jusque dans ses dernières retraites; et pour les Q épisodes on n‘aurait eu, en ouvrant l`histoire, que l’embarras du i choix. Nous ne connaissons de tentative en ce sens qu`en Alle- l magne, et ceux qui les ont faites, B. Auerbacli dans son Spiroza, L. Kompert dans ses Scènes du Ghetto et ses Juifs de Beheme, ont pleinement réussi. l Malheureusement, en France, rien n’a été tenté en ce genre, et f le seul aspect sous lequel l`imagination des poëtes et des roman- , ciers nous ait fait connaître au monde, c'est celui dela réprobation l dont ils se sont imaginé que notre front portait l'empreinte et que l nos malheurs étaient le vivant témoignage : on nous a personniliés i dans la légende du JuiflErrant, qui a couru les nations avant de courir les planches. En voici les traits essentiels: Un homme a refusé à Jésus·Christ marchant à la mort le verre d’eau rafraichissante qui doit soulager ses derniers moments, et, au lien de compâtir à sa souffrance, il l`a raillée et insultée; en puni- tion de son iniquité, il est condamné à errer de nation en nation, sans pouvoir s‘arrêter, sans pouvoir mourir : il survivra aux âges, sans consolation e't sans espoir, marqué au front d'un signe écla- tant qui annonce sa faute et le châtiment qui l'a suivie. Tel est le canevas traditionnel, le théme intéressant à suivre et à développer que les imaginations populaires ont enrichi des bro- deries les plus variées, et comme découpé en arabesques; mais aussi, de ce mythe à la réalité, la transition a été facile et l'appli- cation inévitable: on a vu dans chaque juif le Juif·Err¢mt ; on a rendu tous les descendants d’lsraél solidaires dela faute préten-

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