Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/377

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Le 22 juin dans la soirée, Blanchelande partit avec les forces maritimes ; le lendemain, Roume se mit en route par terre pour se rendre à l’Arcahaie et à la Croix-des-Bouquets. Escorté par une soixantaine des coalisés commandés par Lapointe, il reçut de ce dernier, a-t-il dit, tous les avis et les conseils les plus propres à faciliter ses opérations. Il trouva une grande soumission de la part des chefs d’ateliers noirs soulevés dans la paroisse de l’Arcahaie, et réussit à calmer leur animosité contre les blancs du Port-au-Prince. À la Croix-des-Bouquets, il trouva en Bauvais « un homme vertueux par tempérament, par principes et par coutume, qui trouvant dans son cœur la morale qu’il prêchait, la propageait, secondé par les chefs de son armée, parmi les hommes de couleur et nègres libres qui y venaient de tous côtés. Je voudrais, ajoute-t-il, avoir à rendre le même témoignage en faveur de tous les blancs qui se trouvaient là ; mais que j’en suis éloigné ! »

C’est une sorte de gloire pour la classe des mulâtres et nègres libres qui choisirent Bauvais pour leur premier général, de trouver l’éloge de cet homme dans la bouche et sous la plume de tous les blancs, même de ceux qui ont été leurs ennemis les plus acharnés. Page lui-même, ce colon si furieux contre cette classe et contre les esclaves, cet énergumène qui professa sous Robespierre les maximes les plus odieuses, qui conseilla d’employer le poison contre leurs chefs. Page a dit dans son discours historique qu’il a publié à Paris, en 1793, en parlant de Bauvais et de l’affaire du 21 novembre 1791 : « C’est aussi avec justice que chacun rend hommage aux vertus de Bauvais, chef militaire des hommes de couleur. Ce brave citoyen a, plus d’une fois,