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passaient sous ses yeux, quels procédés furent employés à l’égard de Leblanc, envers Desfourneaux, naguère le favori de Sonthonax : tout récemment encore, le général Pierre Michel venait aussi d’être arrêté par ses ordres et mis en détention au fort Picolet. Il suffisait sans doute de toutes ces mesures, pour faire comprendre à T. Louverture que Sonthonax ne considérait les hommes que comme des instrumens qu’il employait quand ils lui étaient utiles, et qu’il brisait ensuite lorsqu’ils n’étaient plus propres à ses vues. Il le comprenait d’autant mieux, que c’était ainsi qu’il les considérait lui-même : de là sa propension à se débarrasser de celui qui le gênait maintenant, dans l’exercice de l’autorité qu’il voulait exercer. Mais, voyons si Sonthonax lui-même ne contribua pas à faire naître l’idée de son expulsion de la colonie : examinons ce qui résulte de sa correspondance particulière, en dehors de cette agence réduite à lui et J. Raymond, au mépris des droits de son collègue.


On a vu Sonthonax chercher à exciter Bauvais contre Rigaud, et nous avons dit que Bauvais, dégoûté, timoré, donna sa démission au commencement du mois d’avril. En même temps, il envoya à Sonthonax une liste d’officiers promus provisoirement à différens grades, pour avoir la sanction de l’agence. Demander sa démission pour aller aux États-Unis, ce n’était pas vouloir exercer à Jacmel ni à Léogane une influence en dehors de celle de l’autorité ; mais comme il n’avait point voulu se désunir avec Rigaud, le dictateur lui devint hostile.

Il écrivit le 7 avril à T. Louverture, alors général de division, commandant le département ou plutôt la province île l’Ouest : « Vous pensez bien, cher général, que