Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 3.djvu/480

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aurait seule le droit d’exporter les productions coloniales, et d’importer en échange ses produits manufacturés, a l’exclusion de ceux du continent. On donnait au Roi d’Haïti[1] l’assurance qu’une forte escadre de frégates britanniques serait toujours dans ses ports ou sur ses côtes pour les protéger. — Des ennemis, poursuit-il, réduits à s’en aller, et dont les escadres venaient récemment de laisser prendre l’Egypte, ne pouvaient donner assez de confiance dans la protection qu’ils offraient. Cette considération eut alors plus d’action sur le bon sens du général noir que ses sentimens patriotiques ; il éluda de se prononcer ; mais il resta si enchanté des Anglais, qu’il ne cessait de répéter : Que la République ne lui avait jamais rendu autant d’honneurs que le Roi d’Angleterre[2]. »

Ainsi, de l’aveu même de Pamphile de Lacroix, il n’y eut que des propositions faites secrètement à T. Louverture, et non pas une convention souscrite par lui. S’il y en avait eu, elle se serait trouvée également dans ses papiers secrets, comme les propositions du général anglais. Et pourquoi T. Louverture ne céda-t-il pas à ces avances ? Serait-ce la futile considération rapportée ci-dessus ? N’avait-il pas appris que l’expédition française n’avait atteint l’Egypte que par le plus heureux hasard ? Ce sont donc ses sentimens patriotiques, son amour pour la France, son attachement pour ses colons, ses émigrés, qui l’empêchèrent de souscrire aux propositions dont il s’agit : la suite de sa carrière prouvera cette assertion de notre part. À notre avis, T. Louverture ne voulait qu’une chose : rester le chef suprême de Saint-Domingue, pour gouver-

  1. Il a sans doute voulu dire Saint-Dominque.
  2. Mémoires, etc. tome 1er, page 346.