Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

auteurs de tous les maux de Saint-Domingue, est devenue une vraie manie sous la plume des écrivains français, ou plutôt un calcul pour dissimuler les fautes de leurs divers gouvernemens et des agens qu’ils employaient dans cette colonie. L’administration inintelligente et barbare de ces derniers, pénétrés d’ailleurs des instructions qu’ils recevaient, soulevèrent la population noire, et ces écrivains ont toujours voulu nier ce résultat. Est-ce que des hommes qu’on opprimait par toutes sortes de mesures vexatoires et cruelles, avaient besoin d’aucune suggestion étrangère pour reconnaître les mauvais desseins conçus contre eux ? Quand des noirs de la Jamaïque se soulevèrent contre l’oppression anglaise et campèrent dans ses montagnes Bleues, furent-ils instigués à cela par une politique étrangère ? Ils ne virent, comme ceux de Saint-Domingue, que la méchanceté exercée à leur égard par l’affreuse cupidité de la race blanche.

Lamour Dérance et Lafortune, restés partisans de Rigaud sous le règne de T. Louverture, ne se soumirent aux Français qu’en apprenant le retour de Rigaud. Mais, lorsqu’ils apprirent sa déportation pour de si puérils motif set avec des circonstances si déloyales, ils se retirèrent dans leurs montagnes pour recommencer la lutte au moment opportun. Et quel moment était plus convenable que celui où ils savaient les troupes blanches mois sonnées par la fièvre jaune ? C’est alors qu’ils agirent, alors que Leclerc faisait encore désarmer les cultivateurs, évidemment pour pouvoir les replacer dans l’esclavage. Ils n’avaient donc pas besoin des insinuations des Anglais, non plus que les autres chefs de bandes dans d’autres localités ; et d’ailleurs, Lamour Dérance et Lafortune avaient vu accourir vers eux des hommes de couleur du