Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Louverture, de tous les chefs noirs et de couleur.  »

Ce fut dans cette situation des choses et des esprits que le couple infortuné, Charles Bélair et sa femme, arriva au Cap. L’ordre du capitaine-général était qu’ils fussent jugés six heures après. La commission militaire était présidée par le général de division Dugua, chef de l’état-major de l’armée, et avait pour ses autres membres les généraux de brigade Clervaux, Dubarquier et Claparède, et le chef de brigade Abbé, commandant de la garde d’honneur de Leclerc. L’adjudant-général Jacques Boyé remplissait les fonctions de rapporteur ou accusateur public. Ainsi, sur 6 membres concourant au jugement, un seul, Clervaux, était indigène, mulâtre.

Les accusés, d’ailleurs convaincus par le fait de révolte à main armée contre l’autorité de la France, furent condamnés, — Charles Bélair, comme auteur principal de la révolte, à être fusillé en sa qualité de militaire, et Sannite, son épouse, comme complice et vu son sexe, à être décapitée. Ce jugement porte la date du 15 vendémiaire an XI, ou 5 octobre 1802.

Dans la journée même, il reçut son exécution derrière le cimetière du Cap, à la Fossette. Charles Bélair reçut la mort avec calme et courage[1]. Son épouse, présente à ce moment suprême, l’exhorta à mourir en brave. C’était une femme énergique. Lorsqu’on voulut lui bander les yeux, elle s’y refusa : on ne put davantage la contrain-

  1. « Charles n’eut pas assez de résolution pour se retirer au Bahoruco, d’où i eût pu se ruer dans les plaines. » Histoire d’Haïti par M. Madiou, t. 2, p. 330.

    Notre compatriote a oublié, sans doute, qu’il y eût rencontré Lamour Dérange et Lafortune, ennemis acharnés de T. Louverture et de tous ses lieutenans. Charles Bélair, déjà jalousé par Dessalines, eut tort de prétendre à être général en chef : il ne pouvait plus se sauver.