Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/287

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gue. Les insensés ! Ils ne connaissent pas la force de la France. Ils ont donc oublié comment le torrent français a envahi Saint-Domingue, il n’y a pas un an ; ils ne savent donc pas que cette maladie cruelle sur laquelle ils ont fondé leur espoir a cessé ses ravages ; que ces braves devant qui ils ont fui tant de fois vont bientôt être en état de courir à de nouveaux lauriers ; ils ne savent pas qu’une armée nouvelle, égale à celle déjà venue à Saint-Domingue, est en route pour les écraser, s’ils sont rebelles, et les protéger, s’ils sont soumis… Ô vous qui sacrifiez une population nombreuse à votre ambition, calculez-vous vos moyens ?… Si vous persistez dans vos projets criminels, craignez la vengeance nationale : vous aurez le sort de Charles Bélair et de son infâme épouse.

Troupes coloniales, je sais que des scélérats ont cherché à vous séduire…

Soldats de l’armée, marins de l’escadre, vous voilà arrivés bientôt au terme de vos peines. La maladie cruelle qui a moissonné vos compagnons d’armes va cesser ses ravages. Une armée sortie des ports de France va se réunir à vous. La saison vous permettra d’agir, et malheur à ceux qui ne seront pas soumis.

Quant à moi, je justifierai la confiance du gouvernement français ; et avec le concours de la brave armée que j’ai l’honneur de commander, je remplirai fat tente de la nation française.

Quelles que fussent les assurances qu’il s’efforçait de donner à ses soldats et aux marins de l’escadre, le capitaine-général ne pouvait pas parler aussi éloquemment à leur imagination, que la fièvre jaune qui continuait ses ravages : tantôt il leur disait qu’elle avait cessé, tantôt il disait seulement qu’elle allait cesser. Cette effroyable maladie était si loin de terminer son cours, que trois semaines après elle enlevait le capitaine-général lui-même.

Cette proclamation, mal digérée, en s’adressant aux troupes coloniales, contenait contre les séducteurs une menace qui devait hâter l’explosion retardée jusque-là.

Déjà, soit pour éloigner de la colonie le général Boudet qui était regretté dans l’Ouest et le Sud depuis que Ro-