Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/345

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lettres de change sur la France : elles furent données en blanc par l’ordonnateur en chef et visées par le capitaine-général. Le négociateur contracta effectivement avec un négociant de cette île, lui délivra ces lettres de change comme si l’argent avait été reçu intégralement, tandis que les versemens ne devaient commencer qu’au mois de juillet 1803 ; la prime accordée s’élevait à 12 pour cent. Il est facile de concevoir qu’un ordonnateur aussi intègre que l’était Daure eut la main forcée par Rochambeau pour une telle affaire. Cet emprunt parut si étrange au Premier Consul, bon administrateur des deniers publics, qu’il ordonna de refuser le paiement de ces lettres de change[1].

Le second objet de la mission de Noailles était de se rendre à la Havane, pour y réclamer une somme de 400 mille piastres qui y était déposée, provenant d’un prêt fait peu auparavant par le Vice-Roi du Mexique au général Leclerc, qui lui avait envoyé à cet effet un fonctionnaire, lequel mourut à la Havane. Mais, en même temps, Noailles était chargé d’y acheter des chevaux pour la cavalerie, et des chiens destinés à faire la chasse aux indigènes en insurrection, qui tendaient de fréquentes embuscades aux Français.

Le fils d’un maréchal de France conçut l’idée de se mettre en rapport avec des éleveurs de chiens, par l’intermédiaire d’un noble descendant des Noailles ! Et ce Noailles oublia ainsi son origine, celle de son illustre famille, datant déjà de plus de trois cents ans ; il consentit à aller débattre avec de tels êtres le prix de ces animaux

  1. Voyez le mémorial de Sainte-Hélène, au 21 septembre 1816. L’empereur Napoléon a victorieusement démontré les raisons qu’eut le Premier Consul pour agir ainsi. Il s’agissait de 60 millions de francs.