Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 5.djvu/428

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Vingt jours après, Magnytot fut à son tour arrêté et déporté dans ce pays, par ordre de Rochambeau. Depuis qu’il avait dénoncé les deux généraux, il se croyait naturellement plus important à raison de ce service rendu au capitaine-général personnellement ; il lui fît de sérieuses observations sur les mesures acerbes qu’il prenait contre les négocians français du Cap, suspectés d’être entrés dans la conjuration des généraux : ce fut le motif de sa déportation. Rochambeau profita de l’occasion pour renvoyer aussi le général Claparède dont la modération lui avait déplu[1].


Retournons dans le Sud.

En nommant Férou commandant de l’arrondissement de Jérémie, Dessalines lui indiquait par cela même qu’il fallait en faire la conquête. Aussitôt après le départ du général en chef pour l’Ouest, Geffrard fit partir Férou dans ce but. Arrivé à l’Anse-d’Hainaut, ce général divisa sa troupe en deux colonnes : l’une, sous les ordres du colonel Bazile, prit la route intérieure par le cours de la grande rivière de Jérémie ; l’autre, sous ses ordres, suivit celle du littoral. Tandis que cette dernière prenait successivement possession de Dalmarie, des Abricots et des autres bourgades de la côte, Bazile enlevait de vive force les postes français établis sur les habitations Bourdon et Marfranc. À l’approche de Bazile de Jérémie, le général

  1. M. Madiou s’est trompé, en attribuant à Magnytot l’initiative du projet de déportation de Rochambeau. Nous avons lu deux lettres de lui au Premier Consul, établissant les faits tels que nous les relatons ; dans la première, datée du Cap, il se faisait un grand mérite de la dénonciation des deux généraux ; elle respire une suffisance extrême ; mais la seconde, datée de New-York, n’est qu’une longue complainte sur l’injustice dont il a été l’objet : il y caractérise le violent despotisme de Rochambeau d’une manière admirable. Telle est l’histoire de bien des hommes.