Page:Aristophane, trad. Talbot, 1897, tome 1.djvu/290

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j’ai là un rempart contre les maux, un préservatif contre les traits. Si tu ne me verses pas à boire, j’ai apporté un vase à longues oreilles, plein de vin ; je me penche et je bois, et lui, ouvrant la bouche pour braire, oppose au bruit de ta coupe une grosse pétarade digne d’un bataillon. N’est-ce pas là exercer une grande souveraineté et qui ne le cède point à celle de Zeus, moi qui entends de moi ce que Zeus entend de lui ? Si nous sommes tumultueux, quelque passant s’écrie : « Quel tonnerre dans le tribunal, ô Zeus souverain ! » Si je lance l’éclair, les riches ahanent d’émoi, et ils lâchent tout sous eux ; et de même les gens tout à fait vénérables. Et toi-même, tu as grand’peur de moi ; oui, par Dèmètèr ! tu as peur ; et moi, que je me meure, si j’ai peur de toi.

LE CHŒUR.

Non, jamais nous n’avons entendu personne parler avec tant de correction et d’intelligence.

PHILOKLÉÔN.

Mais non, il se figurait qu’il vendangerait aisément une vigne abandonnée ; car il savait toute la supériorité de mon talent.

LE CHŒUR.

Comme il a tout passé en revue, sans rien omettre ! C’est au point que je grandissais en l’entendant et qu’il me semblait juger aux Îles Fortunées, ravi de son éloquence.

BDÉLYKLÉÔN.

Le voilà qui se pâme d’aise, qu’il est tout hors de lui ! Va, aujourd’hui, je te ferai regarder les étrivières !