Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1048

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premier lieu, si l'action que nous fait faire le désir est volontaire ou involontaire. Il n'est pas possible qu'elle soit involontaire. Pourquoi cela? et d'où cela vient-il ? Tout ce que nous faisons autrement que par notre libre volonté, nous ne le faisons que par une nécessité qui nous domine. Or, il y a toujours une certaine douleur à la suite de tout ce qu'on fait par nécessité. Le plaisir, au contraire, est une conséquence de ce qu'on fait par désir. Ainsi donc, les choses qui sont faites par désir ne sauraient être involontaires, du moins en ce sens ; et elles sont certainement volontaires.

§ 3. Il est vrai qu'à cette théorie on pourrait en opposer une autre qu'on fait pour expliquer l'intempérance : « Personne, dit-on, ne fait le mal de son plein gré en sachant que c'est le mal ; et pourtant, ajoute-t-on, l'intempérant incapable de se dominer, tout en sachant bien que ce qu'il fait est mal, ne le fait pas moins ; mais c'est qu'il suit l'impulsion de son désir. Il n'agit donc pas de sa libre volonté ; et il est contraint par une nécessité fatale » .

§ 4. Mais nous réfuterons cette objection par le même raisonnement que plus haut. Non ; l'acte que provoque le désir n'est point un acte de nécessité ; car le plaisir est la suite du désir, et ce qui se fait par plaisir n'est jamais d'une nécessité inévitable. Mais on pourrait prouver encore autrement que le débauché agit de sa pleine volonté ; car apparemment, on ne niera pas que les hommes injustes sont injustes volontairement.