Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1126

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l'instinct naturel du bien, il ne se peut pas davantage qu'une vertu soit contraire à une vertu. Naturellement la vertu se soumet à la raison ; et elle agit comme celle-ci le lui ordonne, de telle sorte que la vertu penche d'elle-même du côté où la raison la conduit ; car c'est la raison qui choisit toujours le meilleur parti. Les autres vertus ne sont pas possibles sans la prudence, pas plus que la prudence n'est complète sans les autres vertus.

§ 11. Mais toutes les vertus se prêtent dans leur action un mutuel secours; et elles sont toutes les compagnes et les suivantes de la prudence.

§ 12. Une question qui n'est pas moins délicate que les précédentes, c'est de savoir s'il en est des vertus comme des autres biens extérieurs et corporels. Quand ces biens sont par trop abondants, ils corrompent les hommes par leur excès ; et c'est ainsi que la richesse excessive rend les gens dédaigneux et durs; et les autres biens de cet ordre, pouvoir, honneurs, beauté, force, ne corrompent pas moins que la richesse.

§ 13. En serait-il donc ainsi de la vertu ? Et si la justice ou la bravoure se, trouvaient à l'excès dans le coeur d'un homme, cet homme en serait-il plus mauvais ? Non sans doute, il ne le serait point. Mais, ajoute-t-on, c'est de la vertu que vient la gloire ; et la gloire poussée à l'excès rend les hommes plus mauvais et