Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1132

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lui fait voir et rechercher les mauvaises actions qu'il commet. Mais d'un autre côté, il semblerait absurde que ce qu'il y a en nous de plus puissant et de plus ferme fût dominé et vaincu par quelqu'autre chose. Or, de tout ce qui est en nous, la science .est sans contredit ce qui est le plus stable et le plus fort ; et cette remarque tend à prouver que l'intempérant n'a pas la science de ce qu'il fait.

§ 5. S'il n'en a pas la science précise, en a-t-il du moins l'opinion, le soupçon? Mais si l'intempérant n'a qu'un simple soupçon de ce qu'il fait, alors il cesse d'être blâmable. S'il fait quelque chose de mal sans savoir précisément que c'est mal, et en ne faisant que le supposer d'une opinion incertaine, on peut lui pardonner de se laisser aller au plaisir, puisqu'il commet le mal en ne sachant pas bien que c'est du mal, et en ne faisant que le présumer. On ne blâme pas ceux qu'on excuse ; et par suite, puisque l'intempérant n'a qu'un vague soupçon, il n'est pas blâmable. Mais de fait, cependant il est digne de blâme.

§ 6. Tous ces raisonnements ne font qu'embarrasser. Les uns, en niant que l'intempérant ait la science de ce qu'il fait, ne font que mener à une conclusion absurde; les autres, en soutenant qu'il n'en a pas même une vague opinion, nous ont menés à une obscurité non moins choquante.

§ 7. Mais voici d'autres questions que l'on pourrait