Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/308

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audacieuses ; et pendant que M. Fischer les proposait avec tant d'assurance, il eût été bon aussi qu'il nous expliquât comment il se faisait que l'antiquité, qui avait eu raison de transporter dans la Morale à Eudème deux livres entiers de la Morale à Nicomaque, avait eu tort d'y transporter aussi les théories principales d'un troisième. M. Fischer répondra sans doute que la main d'Aristote est reconnaissable dans toute cette grande théorie de la justice du livre cinquième ; et qu'elle ne l'est plus dans ce qui suit. C'est là tout simplement une affaire de goût ; et M. Spengel, ainsi que bien d'autres, pourraient être d'un avis tout différent. En outre, il est bien difficile de comprendre que la composition de la Morale à Nicomaque puisse se passer de la théorie des vertus intellectuelles. Cette théorie forme la totalité du sixième livre , et elle est dans l'ouvrage aussi nécessaire que celle des vertus morales. Il est possible qu'elle n'y ait pas reçu tous les développe- ments nécessaires, et qu'Aristote ici nous paraisse en faute, comme il l'est dans tant d'autres ouvrages. Mais sans cette théorie le système est boiteux en quelque sorte ; et comme c'est une hypothèse qui seule y cause cette fâcheuse lacune, il vaut mieux encore laisser à la respon- sabilité du philosophe un défaut qui lui est habituel, et qui n'est pas très-grave, que de lui en prêter un qui l'est beaucoup plus, et qu'il n'a peut-être point.

Il faut accorder à M. Fischer que cette question qui le choque tant, à savoir jusqu'à quel point on peut être injuste envers soi-même, est assez insignifiante en effet par la manière dont elle est présentée. Mais il est forcé de reconnaître lui-même qu'elle est annoncée dans les cha- pitres qui la précèdent. De plus, tout en concédant qu'elle

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