Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/169

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qui se rapportent au plaisir ou à la peine que nous ressentons de ce qui arrive aux personnes que nous connaissons. En effet, l’homme susceptible d’une indignation généreuse, s’afflige du bonheur qui arrive à ceux qui en sont indignes ; et l’envieux, exagérant ce sentiment, s’irrite du bonheur de tout le monde ; mais le malveillant, au contraire, est si peu disposé à s’affliger ou à s’irriter, qu’il se réjouit du mal d’autrui : mais j’aurai occasion de revenir sur ce sujet. Quant à la justice, comme son nom n’a pas une signification simple, je parlerai, dans la suite[1], des deux rapports sous lesquels on doit la considérer, et je ferai voir comment on y observe un juste milieu ; et je traiterai également des vertus qui se rapportent à la raison.

VIII. Puisqu’il y a trois sortes de dispositions[2], parmi lesquelles deux sont vicieuses, l’une par excès, l’autre par défaut, tandis qu’une seule, celle qui tient le milieu, constitue la vertu ; on voit qu’elles sont opposées les unes aux autres ; car les deux extrêmes sont opposés entre eux et au milieu, et le milieu l’est à l’un et à l’autre extrême. En effet, comme (dans une progression arithmétique) le terme moyen est plus grand que le plus petit des deux extrêmes, et moindre que le plus grand ; ainsi, les habitudes moyennes, dans tout ce qui tient aux passions et aux actions, sont, pour

  1. C’est le sujet du cinquième livre de ce traité.
  2. Voy. M. M. l. i, c. 9 ; Eudem. l. 2, c. 5.