Page:Aristote - Politique, Thurot, 1824.djvu/135

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10. Mais on pourra nous demander, en supposant véritable ce qui vient d’être dit, s’il faut donc que les simples ouvriers aient de la vertu ( car il leur arrive souvent, par inconduite, de négliger leurs travaux) ; ou bien, est-ce ici un cas tout différent ? En effet [dira-t-on peut-être] l’esclave vit en commun avec son maître ; mais l’artisan est plus indépendant, et sa condition ne comporte qu’un degré de vertu proportionnel à celui de sa dépendance, puisque l’artisan, voué aux professions mécaniques, n’est assujetti qu’à une servitude

sont une preuve de l’égarement inévitable où tombent les esprits même les plus éminents, quand une fois ils ont adopté des principes faux ou des données inexactes. Mais rien n’est plus remarquable, en ce genre, et relativement à cette question particulière, que la contradiction manifeste où sont tombés les auteurs et les interprètes des lois romaines. Ils définissent la servitude, « une constitution du droit des gens, ou des nations, « en vertu de laquelle un homme se trouve soumis, contre nature, « à la domination d’un autre » . Servitus autem est constitutio juris gentium, quâ quis dominio alieno contra naturam subjicitur. (Institut. 1. 1, Tit. 3, § 2.) Ce que les commentateurs ont fort bien interprété, en disant que les hommes réduits en servitude étaient considérés comme des choses, et non comme des personnes. Redacti in hanc conditionem non pro personis, sed pro rebus, immo pro nullis habebantur. (Heinecc. Antiq. rom. ; Jurisprud. illustr., p. 94, édit. Francf. 1771.) Or, assurément il n’y a sur la terre aucune puissance capable de faire qu’un homme soit une chose, ni de faire qu’une chose soit un homme. Aussi tous ceux qui ont tenté de réaliser cette atroce et monstrueuse absurdité, ne sont-ils parvenus qu’à établir un état d’inimitié irréconciliable, une guerre à mort toujours subsistante, entre le maître cl l’esclave.