Page:Aristote - Politique, Thurot, 1824.djvu/68

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DISCOURS

sacrifié à l’autre, doivent nécessairement perdre, dans cette situation violente, leurs qualités les plus précieuses ; qu’il se fait alors, de l’un à l’autre, comme un échange continuel de tous les penchants vicieux, de toutes les inclinations perverses, en un mot, de tout ce qu’il y a de plus mauvais dans la nature de chacun d’eux. L’esclave devient flatteur, faux, rampant, parce qu’il a intérêt d’adoucir un maître capricieux et cruel ; et le maître devient plus cruel, plus orgueilleux, plus capricieux, parce que l’esclave fomente, pour ainsi dire, en lui tous ces vices. Tous deux se corrompent donc de plus en plus l’un l’autre, et ainsi se trouvent étouffés et détruits les germes de vertu que la nature avait mis dans leurs âmes. Étrange effet de l’habitude et de l’ordre de choses qui existait partout autour d’eux ! Ces profonds observateurs de la nature humaine ne s’aperçurent pas que le phénomène de l’influence du despotisme et de la tyrannie sur le caractère moral des nations, et sur celui des doinitiateurs eux-mêmes, phénomène dont ils avaient démêlé avec tant de sagacité et décrit avec tant de vérité toutes les circonstances, se reproduisait, presque à chaque instant, sous leurs yeux et au sein même de leurs familles.

Une autre erreur, qui leur fut commune avec tous les législateurs qui les ont précédés et avec le plus grand nombre des écrivains politiques qui PRÉLIMINAIRE. lxvij

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