Page:Arnaud - Recueil de tombeaux des quatre cimetières de Paris, 2.djvu/79

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Quel objet nouveau se présente ?
C’est la Reine des Arts, en longs habits de deuil.
Elle approche, soupire, et sa main languissante
Peut à peine graver ces mots sur le cerceuil :
» Arrêtez-vous dans ce lieu solitaire ;
» À ce funèbre monument
» Le malheureux redemande une mère,
» Les beaux arts un appui, le monde un ornement…
Ah ! je le reconnais, trop aimable Rosire ?
Tous les cœurs t’ont nommée à ces augustes traits ;
Jouis donc des tributs de ce nouvel empire :
Ton âme parmi nous survit à tes attraits,

Ombre charmante que j’adore,
Puissent jusques à toi parvenir mes douleurs !
La même muse, hélas ! qui chantait ton aurore ;
Vent, lorsque tu n’es plus, te célébrer encore ;
Je t’offrais de l’encens, et je t’offre des pleurs.

Ô toi, de nos destins souveraine sanglante,
Inflexible divinité,
Horrible mort ta faulx dans l’ombre étincelante,
Frappe indistinctement, les talens, la beauté ;
Puissai-je, signalant le transport qui m’anime,
De tes avares mains arracher la victime ?
Puissai-je… vains désirs ! D’effroyables tombeaux.
Des antres inconnus te servent de retraite ;
Tu triomphes enfin ; ta rage est satisfaite :
Les jours de nos regrets sont tes jours les plus beaux…
Poursuis, livre aux humains une éternelle guerre,
Mais choisis des objets dignes de tes fureurs ;
Et s’il faut que toujours tu moissonnes la terre,
Ôtes-lui ses poisons, mais laisses-lui ses fleurs,