Page:Arnould - Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, v1.djvu/87

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plétement oblitéré chez eux le sens moral. Ils ont un honneur qui n’est pas l’honneur, et qui s’appelle honneur militaire. Pourvu qu’ils rendent leur épée d’après certaines règles prévues par leur Code, cet honneur est sauf et leur conscience satisfaite.

Leur courage également est un courage à part, qui s’appelle le courage militaire. Ce courage consiste à ne point baisser la tête quand les obus sifflent aux oreilles ; mais il doit cesser aussitôt qu’à certaines murailles il y a certaines brèches de tant de centimètres carrés.

Leur demander un autre courage et un autre honneur, — sauf exception, cela va sans dire, — c’est comme si l’on demandait au laquais qu’on paie, de l’affection pour ses maîtres, en plus des services qu’il est tenu de leur rendre.

Quand il a frotté l’appartement, ou pansé les chevaux de Monsieur, que Monsieur agonise, s’il veut, le laquais a rempli son devoir, et il court se griser à l’office.

Quand une garnison a envoyé, et reçu un nombre fixe d’obus, elle a rempli son devoir, et les officiers peuvent se promener, l’air fendant, la moustache en croc, sur les ruines de la France avilie et mourante.

Ils ont gagné leur solde, des grades et l’admiration de M. Thiers.

Les marins livrèrent donc les forts ; l’amiral Saisset mit la clef sous la porte et s’en alla, les mains dans ses poches, offrir ses congratulations au général Ducrot, qui les lui rendit.

L’armée régulière, dès longtemps préparée à ce dénouement qu’on lui avait appris à souhaiter avec impatience, déposa les armes sans aucun murmure, et se répandit dans les rues, l’air