Page:Aubertin - Sénèque et Saint Paul, 1872.djvu/459

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vous traitant d’ennemis publics et de criminels, vous attribue tous les malheurs de l’État ? Sachons supporter notre sort et plier au temps, jusqu’à ce qu’un bonheur inaltérable mette fin à nos souffrances. Les anciens âges ont eu à subir le Macédonien, fils de Philippe, le Perse Darius et Denys ; notre siècle a gémi sous Caligula, autant de tyrans qui n’avaient d’autres règles que leurs caprices. On sait, à n’en pas douter, quelle est l’origine des fréquents incendies qui désolent la ville de Rome, et si d’obscurs mortels pouvaient en révéler la cause et parler impunément sur ces mystères, l’évidence brillerait à tous les yeux. Chaque jour on envoie au supplice des chrétiens et des juifs, désignés sous le nom d’incendiaires. Mais il tombera à son tour, ce scélérat, quel qu’il soit, qui met son plaisir à se faire bourreau, et qui a recours au mensonge pour voiler ses crimes. Si les plus vertueux ont servi, cette fois, de victimes expiatoires pour tout le peuple, lui aussi subira pour tous la peine du feu éternel. Cent trente-deux maisons, quatre quartiers ont brûlé pendant six jours. Le feu s’est arrêté dans la septième journée. Porte-toi bien, mon frère.


LETTRE XIII.


sénèque à paul, salut.


Je te salue, mon cher Paul. L’énigme et l’allégorie règnent dans tes ouvrages. Il faudrait relever cette force de pensées qui t’est propre, sinon par de vains ornements, du moins par une certaine élégance. Ne te laisse pas arrêter par la crainte que je t’ai entendu exprimer plus d’une fois : beaucoup, disais-tu, par une telle recherche, dénaturent les pensées et énervent la vigueur des sentiments. Daigne au moins faire quelque chose pour la