Page:Audoux - De la ville au moulin.djvu/81

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avec tant de grâce ? Elle n’a que faire du fléchissement d’épaule d’oncle meunier, et il semble qu’elle soit là pour le guider et non pour le suivre.

Firmin ne la quitte pas des yeux. Deux fois déjà il s’est tourné vers moi comme pour me prendre à témoin que jamais mariée ne fut plus belle.

À l’église, Angèle s’agenouille et se lève sans déplacer d’une ligne son admirable maintien. Je la regarde encore lorsque sonne la clochette pour l’élévation. Courbée sur son prie-Dieu, ses coudes écartant son voile comme deux ailes, elle semble un grand ange en adoration devant l’Éternel.

Un regret me vient de ne pas être pieuse comme elle. Et parce que tout le monde s’incline sous l’impérieux commandement de la clochette, je courbe aussi la tête devant le calice.


Les beaux dimanches d’été ramènent maintenant au moulin Firmin et Valère Chatellier. Ce sont des dimanches bruyants et mouvementés qui font la joie des jumeaux, de Clémence et de la petite Reine. Il y a les courses à travers champs, les promenades sur les routes et par les étroits sentiers. Et surtout, il y a le bois des grands chênes. Ce bois, situé à une heure de marche du moulin, est plein de fraîcheur et d’ombre. Des ruisseaux ayant tracé eux-mêmes leur chemin s’y cachent et s’y rejoignent comme en se jouant. Et les clairières pleines d’herbe tendre, et les mousses épaisse qui s’étalent sous les vieux arbres en font un endroit où il serait bien difficile ne pas plaire.

Firmin, comme un tout jeune garçon, monte aux branches, saute les ruisseaux, et court avec