Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/175

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cette voix qu’elle n’avait pas oubliée. Assise à la meilleure place, dans le petit salon de l’organiste, elle écoute chanter Églantine. Elle l’écoute et la regarde. En même temps que la voix magnifique, elle retrouve le visage aux yeux trop grands, ce visage éclairé par un rayon mystérieux qui veille à l’entour et empêche les ombres de s’y poser.

Mlle Charmes ne doit rester que quelques heures à Paris. À peine si elle parle de Bléroux ; un peu seulement du bonheur de Marguerite et Louis Pied Bot qui en sont à leur quatrième enfant, et qui n’oublient pas leur amie absente ; de Noël, elle ne sait rien, pas même s’il est en Algérie. Et soudain, elle interroge d’un ton brusque :

— Êtes-vous sûre qu’il soit intelligent ?

Églantine rougit. Cette question ne s’était jamais présentée à son esprit. Elle répondit simplement :

— Je l’aime.

Heureuse de revoir Mlle Charmes, plus heureuse encore de lui entendre prononcer le nom de Noël, elle sourit. Elle rit même, et l’éclat de ses fines dents augmente tellement la clarté de son visage qu’au moment de la quitter Mlle Charmes lève le doigt pour lui dire, en riant elle-même :