Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/186

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et couvrant les murs du haut en bas, ce n’est pas pour Tensia. C’est pour cette magnifique créature victime d’un accident, pour celle-là seulement, que cette foule élégante avait sans doute aimée autant qu’admirée. Quant à lui, il n’était là que pour entendre Églantine qui devait venir chanter le Dies Irae, accompagnée par un musicien inconnu, un riche étranger, disait-on, qui avait suivi la troupe d’acteurs et était venu lui-même supplier Églantine de donner cette marque d’amitié à celle qui n’était plus.

Jacques Hermont entend les premiers chants sans y apporter grande attention. Il les a si souvent accompagnés lui-même ! Que ce soient chants de douleur ou chants de triomphe, à la longue cela devient un métier que l’on fait sans y penser. Il ne sait pourquoi, aujourd’hui, il a si grande hâte d’entendre la voix d’Églantine. Il la connaît à fond pourtant. Mais il se souvient du Miserere. Il en garde le son dans l’oreille, et retrouve la surprise et l’émotion qui l’ont bouleversé alors. À entendre cette voix ici, dans cette grande église, il lui semble qu’il ne sentira plus ce poids qui lui écrase la poitrine, ni ces chocs qui heurtent ses tempes avec tant de violence. Soudain il s’in-