Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/220

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mettront longtemps à revenir. Elle parle du passage dans la nuit de grands bateaux dont le falot a l’air d’une étoile en voyage traçant son chemin pour le retour. Elle parle aussi de la lune, triste et pâle, qui vient se mirer dans l’eau avec l’espoir d’augmenter son éclat. Et surtout elle dit la joie silencieuse des amants qui profitent de l’heure tardive pour s’éloigner du rivage dans une toute petite barque, et voguent sous le ciel serein, sans souci de l’air qui fraîchit ni des méchants qui les guettent.

À la mer, qui lui dit tant de choses, Églantine peut parler de son pays.

— Dans notre sapinière, les chemins étaient à peine tracés, et cependant nous les suivions dans l’obscurité sans jamais nous tromper.

Elle dit la beauté d’un verger fleuri où dort, près de la barrière d’entrée, un ami qui fût toujours fidèle, et qui mourut pour la sauver. Elle parle aussi de son étang :

— Il était tout petit, pas plus grand que cette crique qui est à mes pieds. Nous en faisions le tour à la nage, des fois et des fois, sans que l’envie d’un plus grand nous soit jamais venue. Il se trouvait juste au milieu de la sapinière. Les arbres qui l’en-