Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/163

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Le jour baissa tout à coup et la neige se mit à tomber. Elle tourbillonnait molle et légère comme du duvet fin et Mlle Herminie nous la montrait du doigt en disant selon son habitude :

— Les anges secouent leurs ailes.

Clément ne s’attarda guère à regarder la neige. La boutique de tapissier, bien décorée et bien achalandée où il se voyait déjà le maître, absorbait toute son attention. Il me prévint que notre mariage aurait lieu dès son retour du régiment et ses yeux s’adoucirent tout à fait, lorsqu’il me dit en se levant :

— Vous me serez très utile dans mon métier, et je suis sûr que vous ne regretterez rien.

Il allait commencer une autre phrase ; mais le patron l’en empêcha en se moquant :

— Eh ! On ne sait jamais… Ne chante pas si vite… donque.

Clément rit avec nous et Mme Dalignac qui s’était levée en même temps que lui, étendit la main pour me dire :

— Croyez-moi, c’est un bon garçon…

Elle riait doucement. Et toute la joie qui était en elle semblait se répandre autour d’elle.

Avant de partir. Clément jeta un rapide coup d’œil sur la plupart des objets comme s’il en faisait le compte. Puis il déplaça les deux bouquets du matin qu’il trouvait trop rapprochés l’un de l’autre, et après avoir flairé la petite violette solitaire, il la prit et la mit sans façon à la boutonnière de sa tunique. Il sortit derrière le patron et