Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/230

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avec mon frêle canot sur les criques des rivages bourbeux, et fait glisser ma barque galante sur les vagues gonflées de l’Océan.

Maintenant donc, cher lecteur, je vais reprendre mes descriptions et faire un pas de plus vers l’accomplissement de cette tâche qui, soit dit avec une juste modestie, semble m’avoir été imposée par Celui qui m’a appelé à l’existence. On peut dire qu’aux États-Unis, le corbeau est jusqu’à un certain point un oiseau émigrant, puisqu’on en voit qui descendent aux régions extrêmes du sud, durant les grands froids de l’hiver, et qui ensuite, à la première apparition d’une saison plus douce, regagnent les cantons du milieu, de l’ouest et du nord. Quelques-uns sont reconnus pour nicher dans les parties montagneuses de la Caroline du Sud ; mais ces exemples sont rares et dus uniquement à la sécurité qu’ils y trouvent pour élever leurs petits, parmi des précipices inaccessibles. Leurs lieux habituels de retraite sont les montagnes, les bancs abrupts des rivières, les bords des lacs hérissés de rochers, les sommets escarpés des îles désertes ou peu peuplées. C’est là qu’il faut guetter et observer ces oiseaux, si l’on veut connaître leurs mœurs et leur vrai naturel manifesté, cette fois, dans toute sa liberté, loin de la crainte de leur ennemi le plus dangereux, le roi de la création.

Au milieu d’une atmosphère claire et raréfiée, le corbeau déploie ses ailes lustrées et sa queue ; à mesure qu’il gagne en avant, chaque coup de rame audacieux qu’il donne l’emporte de plus en plus haut ; comme s’il savait que, plus il s’approche du soleil, plus reluisantes