Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/25

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formant les îles abruptes de l’un et l’autre bord, comme aussi la rapidité des courants qui règnent entre elles, font de cet asile l’un des plus convenables qu’elles puissent désirer. Elles se retirent également sur les îles pendant l’hiver ; mais alors leur nombre est bien diminué ; et maintenant, aux environs de Louisville, ces Oies sont devenues si farouches que, sur les étangs où elles viennent chaque matin pour manger, la moindre alerte, la simple détonation d’une arme à feu, les fait se renvoler immédiatement vers leurs rochers : et cependant, même ici, le danger les menace encore ; car, assez souvent il arrive qu’une troupe entière s’abatte à demi-portée de fusil d’un chasseur à l’affût dans une pile de bois flotté, dont il sait se faire un abri, qui généralement leur devient funeste. J’ai connu un gentleman, propriétaire d’un moulin situé en face Rock-Island, et qui s’amusait à bombarder ces pauvres Oies, à la distance d’un quart de mille, au moyen d’un petit canon chargé à balles ; et si je ne me trompe, M. Tarascon en jetait ainsi bas plus d’une douzaine à chaque coup. Cela se pratiquait à la pointe du jour, alors que les malheureuses n’étaient occupées qu’à se remettre les plumes en ordre, un instant avant de prendre l’essor. Mais cette guerre d’extermination ne pouvait durer : les Oies désertèrent le roc fatal, et le redoutable canon du puissant meunier ne dut pas lui servir plus d’une semaine.

Sur l’eau, l’Oie du Canada se meut avec une grâce remarquable, et sa manière d’être, en général, ressemble beaucoup à celle du Cygne sauvage, auquel je la crois