Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/266

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volant haut dans les airs et suivant le cours des fleuves. L’idée communément reçue que ces oiseaux n’accomplissent leurs migrations que par eau, est on ne peut plus absurde. J’ai déjà fait quelques remarques à ce sujet ; mais comme on n’en peut trop dire, quand il s’agit de combattre une erreur qui tend à s’accréditer, je répète ici que j’ai vu des troupes de Grèbes passant, au temps de leurs migrations, très haut en l’air, et avec une grande rapidité, sans pour cela paraître plus gênés que beaucoup d’oiseaux en apparence mieux doués pour le vol.

Un soir, le 14 octobre 1820, je me laissais aller paisiblement au cours de l’Ohio ; le temps était très calme, et je fus surpris d’entendre au-dessus de ma tête, comme un sifflement d’ailes semblable au bruit que fait un faucon lorsqu’il fond sur sa proie. Je levai les yeux et vis une troupe de Grèbes, trente environ, qui glissaient vers les eaux, comme pour s’y poser, à un quart de mille de moi. Déjà ils n’étaient plus qu’à quelques pieds de la surface, lorsque, se renlevant tout à coup, ils continuèrent leur route et disparurent. Mais peu de temps après ils revinrent, passèrent à quarante ou cinquante mètres de moi, en décrivant un cercle, et finirent par s’abattre pêle-mêle. Je les vis bientôt tout occupés à se baigner et faire leur toilette, selon l’habitude des canards, des cormorans et autres oiseaux aquatiques. Je me mis à ramer autour d’eux ; à peine firent-ils attention à moi, et je pus m’en approcher à mon aise. Quand je les jugeai en nombre suffisant et qu’ils me parurent bien serrés l’un contre l’autre, je