Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/368

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Il pouvait être minuit, lorsque nous arrivâmes à une sorte d’auberge où nous prîmes quelques instants de repos. De cet endroit divergeaient plusieurs routes, et les charrettes se séparèrent, une seulement devant continuer son chemin avec nous. La nuit était noire, mais le sable nous indiquait suffisamment la voie. Tout à coup un galop de chevaux frappa mon oreille ; nous nous retournâmes et reconnûmes que notre attelage était dans un danger imminent : mon conducteur sauta à bas de son siége et tira précipitamment ses chevaux de côté ; il n’était que temps, car les fuyards passèrent tout à côté de nous, ventre à terre, mais sans pourtant nous toucher. Derrière eux courait leur maître hors d’haleine : ils avaient été, nous dit-il, effrayés par un bruit venant des bois, mais sans doute ils ne tarderaient pas à s’arrêter. Il achevait à peine de parler, que nous entendîmes un fort craquement, après quoi il y eut quelques minutes de silence. Bientôt, en effet, le hennissement des chevaux nous apprit qu’ils avaient brisé leurs traits. En arrivant sur le lieu, nous trouvâmes la charrette renversée et, quelques mètres plus loin, les chevaux paissant tranquillement sur le côté de la route.

Le lever de l’aurore, dans les Jerseys et surtout au mois de juin, est digne d’un pinceau plus brillant que le mien ; aussi me contenterai-je tout simplement de vous dire que, du moment où les rayons du soleil commencèrent à dorer l’horizon, nous entendîmes monter vers le ciel les notes joyeuses de l’alouette des prés. De chaque côté de la route s’étendaient des bois clairsemés, et sur la cime des grands arbres j’apercevais de