Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/507

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naient l’essor tous ensemble. Au contraire, si le temps était couvert, pluvieux et froid, ou s’il devait tomber de la neige, ils restaient sur la glace, debout, se promenant ou couchés, en attendant qu’il y eût apparence de mieux, et alors ils partaient encore tous et d’une même volée.

Par une de ces tristes matinées que je viens d’indiquer, nos gens formèrent un complot contre les Cygnes ; et s’étant séparés en deux pelotons qui devaient les prendre, l’un par en haut, l’autre par en bas du courant, à un signal parti du camp, il se mirent lentement en marche. Les pauvres oiseaux ne soupçonnaient aucune trahison, et tant que les hommes furent à plus de cent cinquante pas d’eux, ils se tinrent tranquilles, accoutumés sans doute de longue date avec nous, par suite de nos fréquentes excursions sur la glace. Mais tout à coup, voilà qu’ils se dressent sur leurs pieds, allongent le cou, secouent la tête, en manifestant de grands symptômes de frayeur. Cependant les chasseurs continuaient d’avancer, lorsqu’un coup de fusil étant venu par hasard à partir, la confusion se mit parmi la troupe ailée, et chacun de s’envoler de son côté, les uns remontant, les autres descendant le cours du fleuve, et plusieurs se dirigeant vers le rivage. On fit alors feu de toutes pièces, et une douzaine environ tombèrent, quelques-uns seulement blessés, la plupart roides morts. Le soir même ils se reposèrent à environ un mille au-dessus du camp, et dès lors nous ne songeâmes plus à les inquiéter. Moi-même j’ai vu plusieurs fois tuer de ces Cygnes, et soyez sûr qu’à moins d’avoir un bon fusil, bien chargé