Page:Augier - Théatre complet, tome 5, 1890.djvu/211

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Lancy.

Permettez ; il s’agit de s’entendre sur les mots. Ce que le monde appelle un mariage de raison, c’est-à-dire un mariage où le cœur n’est pas plus consulté que les yeux, où l’on prend une femme dont le plus souvent on ne voudrait pas pour maîtresse, et dont on ne subit la possession qu’à condition qu’elle sera éternelle, je l’appelle, moi, un mariage d’aliéné.

Madame de Verlière, passant à gauche.

À la bonne heure ; mais votre phrase avait besoin de ce commentaire. — Vous êtes un fier original !

Lancy.

En quoi donc ?

Madame de Verlière.

D’abord en tout, et puis en votre façon de faire votre cour.

Lancy.

Qu’en savez-vous ? Je ne vous l’ai jamais faite.

Madame de Verlière.

Première originalité ; mais, aujourd’hui même que vous demandez si singulièrement ma main, j’ai toutes les peines du monde à voir en vous un soupirant.

Lancy.

Parce que je ne soupire pas de mon naturel ; donnez-moi une bonne raison de soupirer, et je m’en acquitterai tout comme un autre.

Madame de Verlière.

Mais êtes-vous bien sûr que vous m’aimez ?