Page:Augier - Théatre complet, tome 5, 1890.djvu/50

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Tous les assauts se ressemblent ; les premiers assaillants restent dans le fossé et font fascine de leurs corps aux suivants ! J’étais la génération sacrifiée : il eût été vraiment trop bête que le sacrifice ne profitât à personne.

Le Marquis.

De mon côté, j’étais heureux de doter ma patrie d’un socialiste de plus. Mais, pour revenir à vous, vous n’aviez plus rien alors sur les bras… C’était le moment de l’épingle.

Giboyer.

C’est ce que je me dis ; mais vous allez voir ma déveine ! La presse ne donnait pas de l’eau à boire, vu le foisonnement des journaux ; alors, j’eus l’idée de faire une série de biographies contemporaines.

Le Marquis.

J’en ai lu quelques-unes ; elles étaient fort épicées.

Giboyer.

Trop épicées ! N’avais-je pas pris au sérieux mon rôle de grand justicier ? Imbécile ! J’écrivais à l’emporte-pièce ; duels, procès, amendes, tout le tremblement ! Mon éditeur effrayé suspendit la publication, et, quand je voulus rentrer dans le journalisme, je trouvai toutes les portes barricadées par les puissantes inimitiés que m’avait créées mon petit sacerdoce. Et cependant Maximilien allait sortir du collège ; je voulais lui parfaire une éducation sterling ; il n’y avait pas à tortiller ni à faire la bouche en cœur : je mis habit bas et je plongeai.

Le Marquis.

Vous plongeâtes ? Qu’entendez-vous par là ?