Page:Auguste Rodin - Les cathedrales de France, 1914.djvu/280

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vations continuent à s’entasser… Je regarde, je tâche de décomposer, de recomposer, comme un essayeur. Il y a vingt ans que je fais cela, que je vis, chaque fois, d’une petite découverte, d’un clair de compréhension, et je ne compte plus sur la conquête de l’absolu.

La science ne se donne pas toute à un homme. Je me rends à cette pensée : je suis un chaînon. Puissé-je avoir contribué à ramener la lumière et la subordination dans l’art ! Et puissé-je être écouté quand je prêche la simplicité comme la condition primordiale du bonheur et de la beauté ! Il est vrai, cette simplicité est difficile à atteindre ; tout ce que nous sommes, tout ce que nous faisons est en rapport avec la nature entière. C’est donc à la nature entière qu’il faudrait toujours penser. Cela est-il possible ? Mais la nature entière n’en est pas moins là, devant moi, dans le modèle : point juste, ou multitude de points justes. Regardons attentivement le modèle : il nous dira tout.

Malheureusement, nous sommes arrivés, dans les villes, à une si fébrile excitation que la nature a bien de la peine à nous calmer. Je suis encore, quant à moi, impatient des passions des hommes. Peut-être est-il bon d’avoir ainsi toujours le malheur en sautoir, pour ne pas s’engourdir…

Ma nouvelle amie, la vieillesse, — que mes contemporains m’ont faite si belle ! — met en moi des certitudes, que je voudrais, en retour, partager avec tous.