Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/45

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Fagaras, et ne franchit la chaîne que beaucoup plus bas.

Quoique la saison fût peu avancée lorsque nous traversâmes Fagaras, il régnait un froid très vif qui contrastait singulièrement avec les moissons dont les champs étaient encore couverts. Les montagnes qui terminent au sud la Transylvanie bornaient continuellement l’horizon. Elles se groupent quelquefois par masses énormes, de façon que l’œil se perd dans une suite de cimes hautes et ardues. La neige les avait déjà blanchies. Des nuages de plomb roulaient lentement au ciel , qui semblaient les prolonger sans fin, comme si nous eussions eu devant nous les bornes de la terre. Les montagnes portent à leur base d’antiques forêts de sapins, ce qui leur donnait là une teinte sombre. Ailleurs elles se présentent régulièrement fendues, également élevées, pareilles à de gigantesques sillons fraîchement tracés. Quand le soleil paraissait un instant entre les nuages gris, il dessinait des lignes d’argent sur ces cimes et ces arêtes, animait de quelque lueur ces masses de fer, puis bientôt tout rentrait dans l’ombre, et le tableau se cachait dans un épais brouillard.

Placé entre ces montagnes et l’Aluta comme entre des limites naturelles, le territoire de Fagaras fut regardé de bonne heure comme une sorte de province à part, qui avait ses maîtres distincts. Les vayvodes de Valachie y exercèrent un droit de protection : ils eurent la prérogative d’y envoyer des actes de donation et