Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/495

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l’Esprit-Saint. On doit regarder comme n’ayant pas l’Esprit-Saint quiconque n’adhère pas à l’unité du Christ, quiconque prend une direction contraire à cette unité. Car les disputes, les dissensions, les divisions, ne peuvent qu’aboutir, et l’Apôtre a dit de ces hommes : « L’homme animal ne perçoit pas les choses qui sont de l’Esprit de Dieu[1] ». Il est encore écrit dans l’épître de l’apôtre saint Jude : « Ceux-là se séparent eux-mêmes, hommes sensuels, n’ayant point l’Esprit[2] ». Peut-on rien trouver de plus clair, de plus évident ? Bien qu’ils aient les mêmes croyances que nous, qu’ils viennent donc à nous, afin de recevoir l’Esprit-Saint qu’ils ne sauraient avoir, tant qu’ils demeurent les ennemis de l’unité. L’Apôtre les compare aux mages de Pharaon : « Ils ont », dit-il, « l’apparence de la piété, mais n’en ont point la réalité[3] ». Oui, avec cette apparence de piété, ils firent d’abord des prodiges semblables, mais parce qu’ils n’en avaient point la réalité, ils furent impuissants au troisième[4].

18. Mais cherchez encore avec moi pourquoi cette défaillance au troisième signe. Qu’importe à quel signe cette défaillance vienne éclater, au second ou au quatrième signe, puisqu’ils doivent défaillir ? Pourquoi dont fut-ce au troisième ? Mais voyez, comme je vous l’ai promis, si l’Apôtre saint Paul ne compare point les hérétiques à ces mages. « Ils ont », dit-il, « la forme de la piété sans en avoir la réalité : fuis encore ceux-là. Car il en est parmi eux qui s’insinuent dans les maisons, qui entraînent après eux, comme captives, des femmes chargées de péchés et poussées par divers désirs ; lesquelles apprennent toujours sans jamais parvenir à connaître la vérité[5] ». Ils entendent continuellement rendre témoignage à l’Église catholique, et ne veulent point venir à l’Église catholique. Ils disent sans cesse, et ne cessent point d’entendre : « En ta postérité seront bénies toutes les nations[6] » ; ils ne cessent d’entendre : « Demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage, et tu posséderas les confins de la terre[7] » ; d’entendre encore : « Toutes les familles de la terre se souviendront du Seigneur et reviendront à lui[8] » ; d’entendre enfin : « Il dominera jusqu’à la mer, et depuis le fleuve jusqu’aux extrémités de la terre ». Voilà ce qu’ils entendent sans cesse, ce qu’ils apprennent sans cesse, et néanmoins sans arriver à la science de la vérité. Voyez maintenant ce que je vous ai promis. Que dit ensuite l’Apôtre ? « De même que Jamnès et Mambré résistèrent à Moïse, de même ceux-ci font opposition à la vérité, hommes corrompus dans l’esprit et pervertis dans la foi ». Que dit-il encore ? « Mais ils n’iront pas au-delà, car leur folie sera connue de tout le monde, comme le fut celle de ces hommes[9] ». Voyez donc pourquoi ils succombèrent au troisième signe. Souvenez-vous que ceux qui s’opposent à l’unité n’ont point le Saint-Esprit. Or, il est facile de voir que les trois premiers préceptes du décalogue ont pour objet l’amour de Dieu, et les sept derniers se rapporteraient à l’amour du prochain ; en sorte que les deux tables de la loi et les dix préceptes pourraient se résumer sommairement dans ces deux : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces, et tu aimeras ton prochain comme toi-même : ces deux préceptes résument a toute la loi et les Prophètes[10] ». Reportons donc les trois premiers préceptes à l’amour de Dieu. Quels sont ces trois premiers ? Premier : « Tu n’auras pas d’autre Dieu que moi », et auquel est opposée la plaie de l’eau changée en sang, parce que le principe souverain du Créateur avait été ramené à l’image d’une chair humaine. Second précepte : « Ne prends pas en vain le nom du Seigneur ton Dieu ». Autant que j’en puis juger, il s’agit du Verbe ou Fils de Dieu. « Car il n’est qu’un seul Dieu, et un seul Jésus-Christ Notre-Seigneur, par qui tout a été fait[11] ». À l’encontre du Verbe, les grenouilles. Comprends les grenouilles à l’encontre du Verbe, le bruit à l’encontre de la raison, la vanité à l’encontre de la vérité. Le troisième précepte, concernant le sabbat, est dans les attributs de l’Esprit-Saint, à cause de cette sanctification que nous entendons pour la première fois au jour du sabbat, ce que nous vous avons signalé avec autant d’instance qu’il nous a été possible. Or, l’opposé de

  1. 1Co. 2, 14
  2. Jud. 1, 19
  3. 2Ti. 3, 5
  4. Saint Augustin avait raison de nous dire qu’il y a des difficultés dans les explications qu’il donne ; ces difficultés redoublent encore à cause de l’altération du texte en bien des endroits, ce qui fait le désespoir du traducteur.
  5. 2Ti. 3, 5 et suiv
  6. Gen. 2, 1-2
  7. Psa. 2, 8
  8. Psa. 21, 58
  9. Id. 71, 18
  10. Mat. 22, 37-38
  11. Rom. 11, 36