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L’OISEAU

et l’enchanteur qui connut ses sentimens, malgré le soin qu’il prenait de les cacher, lui dit d’une manière agréable :

Accablé d’un cruel malheur,
En vain l’on parle et l’on raisonne ;
On n’écoute que sa douleur,
Et point les conseils qu’on nous donne.
Il faut laisser faire le temps ;
Chaque chose a son point de vue ;
Et quand l’heure n’est pas venue,
On se tourmente vainement.

Le royal Oiseau en convint, et pria son ami de le porter chez lui, et de le mettre dans une cage, où il fût à couvert de la pate du chat et de toute arme meurtrière. — Mais, lui dit l’enchanteur, resterez-vous encore cinq ans dans un état si déplorable et si peu convenable à vos affaires et à votre dignité ? Car, enfin, vous avez des ennemis qui soutiennent que vous êtes mort ; ils veulent envahir votre royaume : je crains bien que vous ne l’ayez perdu avant d’avoir recouvré votre première forme. — Ne pourrai-je pas, répliqua-t-il, aller dans mon palais, et gouverner tout comme je faisais ordinairement ?

— Oh ! s’écria son ami, la chose est difficile ! Tel qui veut obéir à un homme, ne veut pas obéir à un perroquet ; tel vous craint étant roi, étant environné de grandeur et de faste, qui vous arrachera toutes les plumes, vous voyant un petit oiseau. — Ah ! faiblesse humaine, brillant extérieur, s’écria le roi ! encore que tu ne signifies rien pour le mérite et pour la