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LUTIN

vous donner des mines de diamans et des maisons pleines d’or ; je peux vous rendre excellent orateur, poëte, musicien et peintre ; je peux vous faire aimer des dames, augmenter votre esprit, je peux vous faire lutin aërien, aquatique et terrestre. » Léandre l’interrompit en cet endroit : « Permettez-moi, madame, de vous demander lui dit-il, à quoi me servirait d’être lutin ? — À mille choses utiles et agréables, répartit la fée. Vous êtes invisible quand il vous plait, vous traversez en un instant le vaste espace de l’univers, vous vous élevez sans avoir des ailes vous allez au fond de la terre sans être mort ; vous pénétrez les abîmes de la mer sans vous noyer, vous entrez partout, quoique les fenêtres et les portes soient fermées ; et dès que vous le jugez à propos, vous vous laissez voir sous votre forme naturelle. — Ah ! madame, s’écria-t-il, je choisis d’être lutin ; je suis sur le point de voyager, j’imagine des plaisirs infinis dans ce personnage, et je le préfére à toutes les autres choses que vous m’avez si généreusement offertes. — Soyez lutin, répliqua Gentille, en lui passant trois fois la main sur les yeux et sur le visage ; soyez lutin aimé, soyez lutin aimable, soyez lutin lutinant. » Ensuite elle l’embrassa et lui donna un petit chapeau rouge, garni de deux plumes de perroquet. « Quand vous mettrez ce chapeau, continua-t-elle, vous serez invisible ; quand vous l’ôterez, on vous verra. »

Léandre ravi, enfonça le petit chapeau rouge sur sa tête, et souhaita d’aller dans la forêt cueillir