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LE PRINCE

trompeurs sont capables ; ils ne nous enchantent que pour nous empoisonner ; je l’ai éprouvé. Voulez-vous avoir une destinée semblable à la mienne ? — Ah ! madame, répliqua la princesse, n’y a-t-il point d’exception ? Les assurances que le roi vous donne, et qui paraissent si sincères, ne semblent-elles pas me mettre à couvert de ce que vous craignez ? »

L’opiniâtre fée les laissait soupirer à ses pieds ; c’était inutilement qu’ils mouillaient ses mains de leurs larmes, elle y paraissait insensible ; et sans doute elle ne leur aurait point pardonné, si l’aimable fée Gentille n’eût paru dans la chambre, plus brillante que le soleil. Les Grâces l’accompagnaient ; elle était suivie d’une troupe d’amours, de jeux et de plaisirs, qui chantaient mille chansons agréables et nouvelles : ils folâtraient comme des enfans.

Elle embrassa la vieille fée : « Ma chère sœur, lui dit-elle, je suis persuadée que vous n’avez pas oublié les bons offices que je vous rendis lorsque vous voulûtes revenir dans notre royaume ; sans moi vous n’y auriez jamais été reçue, et depuis ce temps-là je ne vous ai demandé aucun service ; mais enfin le temps est venu de m’en rendre un essentiel. Pardonnez à cette belle princesse, consentez que ce jeune roi l’épouse, je vous réponds qu’il ne changera point pour elle. Leurs jours seront filés d’or et de soie ; cette alliance vous comblera de satisfaction, et je n’oublierai jamais le plaisir que vous m’aurez fait. — Je consens ä tout ce que vous souhaitez,